La Ligne Rouge est un film sur la guerre du Pacifique, adapté d'un roman de James Jones, entre les Américains et les Japonais. Situé sur l'ile de Guadalcanal, le film raconte l'histoire des soldats de la compagnie C dans leur affrontement contre les Japonais. Le casting, extrêmement varié, est compose principalement de Jim Caviezel, Sean Penn, Ben Chaplin, Elias Koteas et Nick Nolte. Sortit quasiment en même temps que « Il faut sauver le soldat Ryan » de Spielberg, le film eu un succès limité en salle mais une très bonne réception critique. Le réalisateur Terrence Malick sort d'une absence de 20 vingt ans pour faire un film tant lyrique que réaliste dont le sujet est tant une étude de la guerre que une étude philosophique.
Les premières images du film sont très parlantes: une nature exotique, verte, non touchée par l'homme. Au milieu, un village d'indigènes qui vit en paix, en harmonie avec cette nature si présente. Des soldats, enfuis de leur régiment, y goutent les joies de la vie simple. Mais arrive leur navire imposant qui les ramène à la réalité. A l'intérieur tout est sombre, sans vie. Malick oppose donc la nature et la guerre, et il va le faire tous au long du film. Mais l'avantage qu'a le réalisateur c'est qu'il sait ou placer sa camera. En effet on a un plaisir immense à voire cette nature filmée sous tous les angles avec une justesse extrême. On a, tout au long du film, des images de végétation dense, d'animaux colorés , du ciel envahis par des aigles magnifiques ou des nuages sublimes. Petite anecdote: Terrence Malick aurai, en plein tournage d'une scène importante, tout arrêté parce qu'il aurait vu un aigle dans le ciel et qu'il voulu le filmé.
De plus le film est une étude détaillée de la guerre. Les scènes de guerre, avec leurs décors et costumes parfaits, sont d'un réalisme effrayant. Elles dépeignent avec justesse les sentiments humains, la peur, la folie etc. Le jeu des acteurs aide beaucoup car il est, pour la plupart, époustouflant. Les soldats dégagent une telle intensité qu'il est difficile de ne pas y croire. Mais au delà des fusillades le réalisateur fait aussi une études des prisonniers qui sont extrêmement utilisé dans le film. Au contraire de beaucoup de film de guerre l'ennemi est, tout d'abord, invisible, il se cache -on le croit intouchable- puis petit à petit on le découvre tout aussi misérable et désespéré. Malick nous montre, sans pudeur, les prisonniers Japonais qui rendent la guerre de plus en plus obsolète car les soldats se rendent compte à leur contact qu'il n'ont de réelle ennemie si ce n'est eux-même.
Mais la qualité du film, sur l'étude qu'il fait de la guerre, est sa manière de transmettre les émotions. En effet Malick fait de son film un voyage sensoriel ou l'image et le son véhiculent toutes l'intensité de la guerre. Les scènes d'avant batailles juxtaposent la nature, omniprésente, et l'attente infernale que vivent les soldats. Puis les scènes de guerre sont de véritables descentes aux enfers ou l'humain est repoussé dans ses derniers retranchements. Malick nous démontre, dans ces moments d'hyper tension, tous ce que le cinema peut apporter aux spectateurs. Exemple frappant: premières fusillades, la plupart des soldats sont apeurés, sursautent à chaque bruit de bombes, quelques uns sont déjà tombé dans la folie tant la mort est proche, et on aperçoit l'image d'un oiseau mourant dans la boue, agonisant, sous les bombardement. La beauté lyrique de ces images symboliques touche le spectateur et le fait réfléchir, il utilise l'art du cinema pour nous atteindre tant sur un plan émotionnel que sur un plan psychologique.
Le film devient un combat sans fin qui met en scène des personnages complexes en quête de vérité sur leur monde. Tous les « guerriers » sont repoussés dans leur retranchements mentals et on les voit donc dénudés et au bord de la crise de folie. Trois soldats servent de fil conducteur a l'histoire, et leurs actions et questionnements sont les étapes majeurs de la quête métaphysique du film. On a tout d'abord Staros (interprété par Elias Koteas), un capitaine d'origine grec qui dirige la compagnie C sous les ordres du lieutenant colonel (interprété par Nick Nolte). Il se réfugie dans l'amour qu'il porte à ses soldats et sa volonté de ne pas les trahir, et va donc désobéir aux ordres. Il refuse de voir ses soldats mourir. Puis le soldat Witt (Jim Caviezel), qu'on voit au tout début du film. La structure philosophique du film est basée sur ses questionnements. Il est le seule qui ne développe pas une peur de la mort et a un regard très rassurant comme s'il savait déjà tout. C'est un prophète qui se retrouve dans sa foi et sa croyance en un monde meilleur: « I seen another world » (j'ai vu un autre monde). Le dernier, le sergent Edward Welsh (Sean Penn), est un réaliste totalement opposé a Witt. Il ne cherche pas de réponse et ne se réfugie pas dans ce sentiment de bravoure sur-dimensionné, mais regarde la guerre comme elle est, sans la mystifier: « Property. The whole fucking thing's about property. » (Propriété. Tout ca est à cause de la propriété). Il est le seule qui survit, Witt meurt et Staros est renvoyé au pays parce qu'il est trop « soft ». Mais tous les trois sont confrontés à la folie qu'engendre la guerre et restent impuissant. Witt conclut: « War don't ennoble men. It turns them into dogs... poisons the soul » (la guerre ne rend pas noble l'être humain. Elle le change en chien... Empoisonne l'âme) alors que Welsh reste fataliste, « What difference do you think you can make, one man in all this madness? » (Quelle difference crois-tu pouvoir faire, un homme dans toute cette folie).
En plus de ces trois personnages, les autres soldats rajoutent à l'étude que fait le film sur la psychologie d'une personne face à la mort. Le réalisateur met en scène des soldats fatigués mentalement et fragiles qui se réfugient tous vers quelque chose, comme l'amour, la bravoure, Dieu, la violence, pour éviter de tomber dans la folie. Ils sont tous dépassés par les évènements et agissent sans réflexion et par instinct. Les regards déconcertent, divaguent, et recherchent une réponse à toute cette violence. Le réalisateur utilise, pour accentuer la fragilité des personnages, des flash-backs souvent succincts et rapides et rappelant ceux de « Ordinary people » (1981) de Robert Redford . Comme dans le film de Redford, ils symbolisent l'intérieur d'un personnage qui face à l'incompréhension, cherche dans ses souvenirs quelque chose de concret, de réel à quoi il peut s'accroché. Souvent en juxtaposés avec des voix off, les flash-backs rajoutent au lyrisme et à la poésie du film tant les images sont « édulcorées » car mémoires fortes d'un personnage. Le film a donc un regard très critique sur la condition des soldats qui sont pour la plupart aliénés de leur sentiment, « I look at that boy dyin', I don't feel nothin'. I don't care about nothin' anymore. » (je regarde ce garçon mourir, je ne sens rien. Je ne tiens plus à rien à présent) ou totalement traumatisé.
Au delà d'un film de guerre, La ligne Rouge, est une oeuvre à ton philosophique. Malick, ancien prof de philosophie au MIT, donne au film un sens métaphysique tant les questions sur la mort, l'immortalité, la nature et la guerre reviennent dans les voix off. Mais il fait mieux que poser des questions, il répond à travers les images. S'installe donc un jeu entre les voix-off de Witt (Jim Caviezel) et les plans qui cherchent à donner une réponse au question qu'il pose. C'est le spectateur qui les interprètent. L'exemple le plus important se constate tout au long du film: Witt cherche des le début du film l'immortalité dans ce qu'il voit et expérience, Malick suggère que cette nature si imposante et omniprésente est immortelle au contraire des soldats qui la souille mais finiront inévitablement par mourir. C'est la nature qui juge l'être humain dans son silence, incitant donc à la folie et la culpabilité. Les soldats survivants sont changés à jamais car pour Malick la guerre n'est pas naturel a l'homme: « What is this great evil? How did it steal into the world? From what seed, what root did it spring? Who's doing this? Who's killing us? Robbing us of light and life. Mocking us with the sight of what we might have known. » (Quel est ce mal? Comment c'est-il glisser dans notre monde? De quelle graine, quelle racine a-t-il germer? Qui fait ca? Qui nous tue? Nous vole de la lumière et de la vie . Se moque de nous avec l'aperçu de ce qu'on aurait pu savoir).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire